Conte « une vieille maison: un grand frisson »

Conte « une vieille maison: un grand frisson »

Si vous aimez vous amuser, ce beau conte sera le meilleur pour vous. Il décrit une maison mystérieuse qui répand des peurs et de la curiosité.

 

L'histoire du conte "maison une vieille: un grand frisson"

Alain venait de racheter une vieille maison, inhabitée depuis des années, et s'apprêtait aujourd'hui à y emménager. En arrivant devant la maison, il réprima un frisson. Avec ses deux fenêtres sur la façade, elle semblait le regarder. Sans se fier à cette première impression, il rentra, et fut surpris de ne trouver ni toiles d'araignée, ni poussière. Tout était propre, prêt à l'accueillir. Comme s'il était attendu. Alain décida aussitôt de visiter son nouveau domicile.

Arrivé dans le salon, il contempla une série de portraits représentant tous les anciens propriétaires de la maison. Il se rappela alors que si la maison était restée inhabitée pendant toutes ces années, c'était parce qu'un beau matin, le dernier propriétaire s'était volatilisé et n'avait jamais été retrouvé. Depuis, personne n'avait voulu habiter la maison, croyant à une malédiction. Alain n'était pas superstitieux. Il avait racheté la maison, sans crainte, et observait maintenant le portrait du propriétaire le plus récent, celui qui avait disparu. Il représentait un vieil homme barbu, au regard malin et au visage rond. Il se dégageait de ce portrait, comme de tous les autres, une incroyable sensation de réalisme, les expressions des visages étaient si bien saisies qu'ils semblaient vivants. Alain détacha son regard du portrait et entreprit d'aménager la maison. À la fin de la journée, il dîna rapidement et partit dans la chambre, puis s'étendit sur le lit.

Peu à peu, il sombra dans le sommeil. Mais tout à coup, il fut réveillé par un bruit insolite. Sans y prêter plus d'attention, il se rendormit. Mais peu après, le même bruit le réveilla tout à fait. On aurait dit des voix. Mais Alain était seul dans la maison. Il se glissa hors de sa chambre, et aperçut une lueur qui semblait venir du salon. Il s'approcha encore, et fut témoin d'une étrange scène. Tous les anciens propriétaires de la maison, tout droit sortis de leurs tableaux, étaient en train de discuter, tout en buvant un café. Apparemment, ils ne l'avaient pas vu. Alain entendit alors un juron, et reconnut le vieil homme. Il était en train de maudire sa tasse de café sous prétexte qu'elle lui avait glissé des mains et avait tâché sa veste. Alain, ne sachant que penser, retourna dans la chambre et eut le plus grand mal à se rendormir.
Le lendemain, dès qu'il se leva, son premier geste fut de se rendre dans le salon. Tout était redevenu normal. Il réfléchit alors intensément pour finir par conclure qu'il avait dû rêver. Il se souvint alors de ce qui s'était passé avec la tasse de café, et se précipita immédiatement devant le portrait du vieil homme. Ses pires craintes se trouvèrent confirmées lorsqu'il aperçut, sur la veste, une tache sombre. Il dut faire un violent effort pour se raisonner. Il se faisait du souci pour rien, la tache n'était pas sur la veste mais sur le tableau. D'ailleurs, pensa-t-il, elle était peut-être même là depuis toujours.

Ce n'était qu'une coïncidence, voilà tout. Alors, après un petit déjeuner pris à la hâte, Alain partit travailler. Il était médecin, et ne pouvait se permettre de manquer à ses obligations à cause d'un simple rêve. Certaines personnes le croyaient fou, simplement parce qu'il avait l'audace d'habiter la vieille maison. Des rumeurs circulaient à son sujet, on le disait possédé par le Diable, on disait que c'était un brigand qui cachait dans la maison son butin. On disait aussi qu'il était totalement inconscient.
Dans la rue, en se rendant à son lieu de travail, il remarqua les regards de travers que lui lançaient les passants. Une vieille femme s'enfuit même en courant rien qu'en l'apercevant. Il ne s'en fit pas, il était tolérant, et comprenait que les gens superstitieux aient peur de lui. Seulement, sa tolérance avait certaines limites, et, lorsqu'un homme lui chuchota : "Ah, mon pauvre monsieur, ah ! si vous saviez !" il ne put se contenir, et empoigna l'homme par les épaules, puis le secoua de toutes ses forces. Tant qu'à devenir brutal, autant l'être vraiment. Il voulait lui faire le plus de mal possible. Puisque ces gens avaient si peur de lui, il allait leur donner une véritable raison de le craindre. Lorsqu'il lâcha enfin l'homme, ce dernier s'enfuit en hurlant. Puis, Alain se rendit à son cabinet, comme si de rien n'était. Visiblement, la nouvelle de son acte envers cet homme avait parcouru la ville, car aussitôt, tous les rendez-vous qu'il avait pour la semaine furent annulés. C'est pourquoi, n'ayant rien d'autre à faire de sa journée, il repensa à ce qui s'était passé. Il était lui-même surpris d'être devenu aussi violent. Il ne savait plus que penser. Une partie de son esprit lui ordonnait d'être patient et compréhensif. D'un autre côté, il haïssait ces gens et leurs superstitions stupides. Il passa sa journée ainsi, à ruminer de sombres pensées.

Quand vint le soir, il sortit dans la rue, et remarqua à nouveau ces mêmes regards méfiants que lui lançaient les passants. Il se rendit donc à la vieille maison d'un pas rapide. Arrivé, il regarda fixement le portrait du vieil homme barbu. Plus il le regardait, plus il le trouvait antipathique. Finalement, son attention fut détournée du tableau par un gargouillement bruyant de son estomac. Il dîna donc, et fatigué, partit se coucher. Cependant, il trouva difficilement le sommeil. Il repensait sans cesse aux réactions des gens dans la rue, ainsi qu'au malheureux qu'il avait brutalisé. Pourquoi avait t-il réagi si violemment ? se demanda t-il. Il ne trouva pas de réponse. Après maintes réflexions, il essaya de dormir. Mais il sursauta en entendant les même voix que la veille. Sans hésiter, il sortit de la chambre et se rendit dans le salon, tout en sachant très bien ce qu'il allait trouver.
Dans le salon, en effet, il trouva à nouveau les anciens propriétaires, sortis de leurs tableaux. Alain entendit l'homme barbu parler : "Cette andouille n'arrête pas de se planter devant mon tableau et de rester là, à me regarder, c'est agaçant !" Il devina aisément qu'on parlait de lui-même. Sans s'attarder plus longtemps, il retourna se coucher, convaincu cette fois-ci de n'avoir pas rêvé. En se réveillant le lendemain, il descendit immédiatement dans la cuisine, et prit un couteau. L'air décidé, il se rendit ensuite au portrait du vieil homme et se mit à lacérer férocement le tableau, pris d'une folie destructrice. Puis, il s'arrêta, et contempla son oeuvre, satisfait. Il déjeuna ensuite normalement, et partit travailler.
Il constata que les gens avaient toujours ce même regard méfiant. Il tenta de se contrôler, mais il n'y parvint pas. Saisissant la personne la plus proche de lui, il se mit à la rouer de coups, devenant toujours plus agressif. Soudain, il reprit le contrôle de lui-même et la lâcha en s'excusant mille fois. Convaincus qu'il était parfaitement fou, les gens s'enfuirent. Alain sut alors qu'il était inutile de se rendre au travail, personne n'accepterait de venir le consulter.

Il retourna donc à la vieille maison, et resta enfermé toute la journée. Il eut ainsi tout le loisir de se poser un tas de questions : était-il devenu fou ? Ne devait-il pas quitter la ville, et s'éloigner des tous ces gens ? Les portraits étaient-ils véritablement vivants, ou bien était-ce parce qu'il était devenu fou ? Toutes ces questions le tourmentèrent durant toute la journée.

Le soir venu, il ne se coucha pas, mais resta à l'affût. Il guettait la venue des anciens propriétaires. Il pensait que le fait d'avoir détruit le tableau avait aussi détruit le vieil homme. C'est pourquoi il attendit que les hommes sortent de leurs tableaux. Quand ce moment se produisit, il faillit pousser un cri en voyant le vieil homme sortir de ce qui restait de son tableau. L'homme avait le visage ensanglanté, écorché. Il n'avait pas porté les coups au tableau du vieil homme, mais au vieil homme lui-même ! Alain fut parcouru d'un frisson d'effroi. Tous les hommes regardaient dans sa direction. Ils l'avaient vu. Alain n'essaya pas de s'enfuir. Il attendit que les hommes viennent à lui.

Le lendemain matin, la police vint faire une enquête. Plusieurs personnes avaient été témoins des agressions commises par Alain. De plus, des hurlements avaient été entendus la nuit dernière. En entrant, les policiers, cherchèrent en vain Alain. Ne le trouvant pas, ils supposèrent qu'il s'était enfui. Un des policiers fit une remarque "Tiens, ce fou a eu envie de continuer la série de portraits ! Il y a ajouté le sien !"